Idéation via personnification

La technique de créativité qui va être résumée s’apparente un peu à l’analogie et beaucoup à l’empathie. Mais c’est une forme d’empathie très inhabituelle : la technique d’idéation par personnification consiste à se mettre à la place non pas de personnes mais d’objets, de choses inanimées et leur donner vie.

C’est pas du tout une pratique courante, elle demande un peu (voire beaucoup) d’efforts, elle oblige à se laisser aller, à lâcher prise … et idéalement en groupe, chaque participant intégrant un objet (choisi ou assigné par un tirage au sort).

Déroulement en 3 temps

Phase n°1 

Choisir le contexte et ensuite dresser un inventaire des objets présents ou impliqués dans le contexte ; objets au sens très large : produits, consommables, accessoires, équipements, etc.

Phase n°2 

Chaque participant se met – essaie de se mettre – dans la peau ou la carcasse de l’objet ; l’objet devenant vivant et animé de ressentis, d’intentions … que peut-il faire pour apporter plus de performance au processus en cours ? 

  • Performance quantitative (ex : stimuler un achat complémentaire, obtenir un rendez-vous, …),
  • Performance qualitative (la qualité du service ou, pour utiliser l’expression en vogue, l’expérience client).

C’est une phase exclusivement divergente, on ne doit dès lors pas viser la logique, le rationnel ou la faisabilité ; on doit essayer d’imaginer un résultat idéal, qu’il soit a priori réalisable ou pas. C’est sans aucun doute ici que se situe l’étape déroutante et le talon d’Achille de la méthode.

Pour le formuler un peu différemment : on s’identifie à une chose et on imagine des postures ou des actions pour séduire, interpeller, inviter … le chaland à faire quelque chose ou à ressentir une émotion. Sans retenue et en visant la quantité bien avant la faisabilité.

Phase n°3 :

La dernière phase est celle de la convergence, du retour progressif à la réalité.

Comment traduire réellement les suggestions émanant de la phase divergente, comment les concrétiser (de manière inventive) ?

Exemple (réel mais partiel) 

Un (grand) magasin de jouets en quête d’idées pour augmenter son attractivité et ses ventes ! Comment intervenir au cours d’un parcours client classique ? 

Extraits de la phase divergente :

  • PANIER (ou CADDIE)
    • se fait remarquer (bouge, parle, …) pour être saisi par le client entrant dans le point de vente
    • se manifeste également (vibrations) quand il passe à hauteur d’une offre particulière
  • BOÎTE de JEU / JOUET
    • étouffe … à cause du film pvc … vraiment pas très écologique …
    • voudrait s’ouvrir, se dévoiler mais pas n’importe comment, plutôt à la manière d’un strip-tease
    • ou à l’extrême, sortir brusquement et bruyamment du rayon pour barrer la route au chaland
  • TÊTE DE GONDOLE / ILOT PROMOTIONNEL
    • attrape le chaland par le bras
    • souffle de l’air (chaud ou froid selon la saison) sur la tête du passant ou dégage un parfum prononcé 
  • HAUT-PARLEUR :
    • pas de proposition
  • SOL :
    • se lève pour mettre des produits à portée de vue du passant.

Ces stimuli (et d’autres) ont conduit ensuite à quelques propositions originales et réalisables.

Appréciations et suggestions

Du fait de ses spécificités limitant notamment les champs d’application et des efforts surhumains ou plutôt extra-humains (s’identifier et donner vie à un objet), cette technique ne peut pas prétendre intégrer le cercle des « superpuissances créatives ».

Mais, pour peu qu’on lui consacre un peu de temps et d’énergie mentale, elle est prête à rendre un bon service. Pas nécessairement à l’étape divergence mais bien à l’étape précédente, quand il est question de faire l’inventaire de choses à prendre en compte. C’est l’occasion de redécouvrir certaines « choses acquises », certains équipements ou éléments matériels faisant partie du décor, que l’on ne remarque plus et risquant fort de ne plus être considérés, à un moment ou à un autre, comme des ressources. Parce qu’il y a fort à parier qu’il y a bien trop longtemps que vous n’avez plus pris la place du client, que vous n’avez pas réalisé, sérieusement, son parcours de A à Z.

Une dernière suggestion : en cas de panne ou pénurie d’inspiration, mettez les 6 composantes du SONCAS sur la table.